N. B. : Le texte est rapporté ici tel qu’il a été écrit par J. Arthur Fournier en 1923.
« La première Gare ou Station fut érigée en 1858. Elle était construite en brique et elle fut incendiée neuf ou dix ans après, c’est-à-dire vers 1870; On en reconstruisit une nouvelle mais en bois cette fois, et servit comme telle jusqu’en 1890. A cette époque, sur la requête de l’agent et sur un rapport envoyé au gouvernement, lequel disait que cette construction était située dans un endroit insalubre, elle fut convertie en hangar à fret et une nouvelle gare à deux étages, plus spacieuse et plus confortable fut construite un peu plus à l’ouest.
Ce fut le 26 décembre 1858 que le public fut admis à voyager sur les trains, allant en haut, de jusqu’à Lévis, et en bas jusqu’à Saint-Pascal, puis l’année suivante jusqu’à la Rivière-du-Loup.
Il y a donc juste 65 ans le 26 décembre 1922, que cette partie de la voie ferrée est en opération; les voyageurs qui étaient obligés de faire le voyage à Québec en voiture, à pied ou en goélettes, étaient forcés à une absence de quatre à six jours et [ ] même davantage, pouvaient, maintenant l’effectuer très commodément en vingt-quatre heures, aller et retour. Aujourd’hui on fait le même trajet en moins de douze heures. [...]
Les locomotives n’avaient ni les proportions, ni la force, ni l’aspect de celle de nos jours. C’est au plus si elles avaient la moitié de la longueur des nôtres; tout était petit en proportion. [...] Ces locomotives étaient chauffées avec du bois. Ce bois était à chaque station sous d’immenses abris situés tout près de la voie afin que le chauffeur put le prendre facilement et le jeter dans le tender ou char à bois contenant aussi [le] réservoir d’eau nécessaire à l’alimentation de la locomotive. Entre la station et la remise de bois se trouvait anciennement le grand réservoir d’eau alimenté par une pompe que faisait mouvoir un vulgaire moulin à vent, lorsqu’une locomotive voulait prendre sa provision, un gros tuyau métallique la conduisait du grand réservoir à celui du [t]ender, puis, la quantité nécessaire était prise, on fermait une valve et le tuyau était relevé droit en haut comme un mât. Depuis que le gouvernement à acheter cette ligne on [n]e se sert plus de ce réservoir qui a été démoli en 1880. [...]
La plupart des chars à passagers était peints en jaune et garnis de petite fenêtres à petits carreaux. Les bancs de bois n’étaient rembourrés et couverts que dans la première classe; les bancs des autres chars n’étaient que de vulgaires bancs de bois peints.
Jusque vers 1880, le personnel des trains était anglais ou censé l’être. Jusqu’à cette époque il était assez rare d’entendre l’un des employés parler français. Il fallait voir le conducteur et ses subordonnées descendre du train encore en mouvement, [...] puis au départ criant encore plus fort: All aboard!... all aboard!... tout en marchand à grandes enjambées sur la plate-forme de la gare.
Heureusement, cet état de chose est changé, et depuis de longues années le personnel est exclusivement canadien sur les trains de l’Intercolonial desservant cette partie de la voie entre Lévis et Campbelton et peut-être jusqu’à Halifax et Montréal. [...]
Texte tiré de :
J. Arthur Fournier, « Mémorial de Saint-Jean-Port-Joli », Saint-Jean-Port-Joli, Musée de la mémoire vivante, 2012 (1923), p. 281-287.
Collections : Tricentenaire de Saint-Jean-Port-Joli (Photographe : Alphonse Toussaint (1918-2008)), Gilles Morin, Réjent Blais (Photographe : Alfred Blais (1866-1949)), André Blais (Photographe : Alfred Blais (1866-1949)), François Trépanier (Photographe : Jacques Trépanier (1907-2003))